Créer un réseau de concession : L’exemple LIPPI
Création du réseau : 1963
Activité : fabrication et commercialisation de clôtures, grillages et portails à destination des particuliers, des professionnels et des collectivités
Niveau de développement, au moment de l’intervention du cabinet : couverture de l’ensemble du territoire national à travers un réseau de distributeurs, de revendeurs et d’installateurs / revendeurs
Apport de Franchise Management : modélisation d’une offre de concession et adoption d’une vraie politique de marque
Enjeux : Construire une politique de marque et modéliser une offre de partenariat pour développer un réseau de concessionnaires et ainsi conserver son avance sur son marché
Lippi est devenu le deuxième acteur industriel français sur le marché de la clôture. Cette entreprise familiale emploie plus de 240 personnes et fabrique 95% de ses produits en France. Elle a réalisé de nombreux chantiers sur le territoire national et dans le monde pour des applications très variées, telles que la sécurisation d’aéroports, de stades, de sites militaires, des centres pénitenciers, des zones portuaires, ou encore, des lieux touristiques comme le Château de Versailles.
Depuis ses origines, Lippi a noué une relation de confiance avec une cinquantaine d’installateurs-revendeurs indépendants isolés, depuis au moins 30 ans pour plus de la moitié d’entre eux. Elle a modélisé une offre de concession pour consolider la position de ces partenaires historiques et s’ouvrir à de nouveaux profils, pas forcément issus du métier, afin de développer son maillage de proximité du territoire.
Rencontres à Mouthiers-sur-Boëme (près d’Angoulême) et à Paris pour un entretien croisé avec des « Lippiens » et une « Lippienne » : Julien Lippi, directeur général, Emilie Caron-Frappier, responsable de réseau, Pierre-Yves Laurent, responsable de marque, et Frédéric Lippi, président du conseil d’administration.
Pourquoi avoir choisi de vous lancer maintenant sous forme de concession ?
Frédéric Lippi, président du conseil d’administration Lippi (copyright Fondapol)Frédéric Lippi : Nous devions d’abord pouvoir nous donner du temps à travers une structure de bilan solide, ce que nous avons notamment réalisé en rendant liquides nos actifs non stratégiques, et construire un mode de management permettant à nos équipes d’analyser et résoudre les problèmes de façon quasi spontanée. En entreprise, le « vivre ensemble », c’est l’avantage compétitif contemporain. Pendant deux ans, nous avons repensé les espaces de liberté professionnels afin de recréer de la valeur partagée. Ainsi, les équipes Lippi peuvent fonctionner en structures mobiles, se composant de manière temporaire en fonction des projets, que chacun peut initier, voire être amené à piloter. La présomption de confiance est déterminante pour réussir ce « vivre ensemble ».
Le contrôle tue l’initiative. Le besoin en entreprise n’est plus de la conformité, mais de la réactivité. Nos expériences nous ont conduits à instaurer un management situationnel pour les équipes : « si le problème est près de moi, je me sens concerné et je m’en saisis puisqu’on m’en donne les moyens ».
Ce mode de fonctionnement a par exemple fait émerger la proposition de services de télésurveillance en complément des clôtures, née de l’initiative d’un salarié dans le cadre de cette liberté d’entreprendre propre à Lippi.
Notre entreprise peut ainsi envisager des décisions sur le long terme.
Avez-vous adapté ce mode de management au fonctionnement du réseau Lippi ?
Frédéric Lippi : Nous avons également cherché à recréer de la valeur partagée avec notre réseau, notamment à travers la création d’une marque. Il nous fallait rendre l’offre Lippi lisible, immédiatement compréhensible par les consommateurs, afin de donner du temps à nos adhérents en termes d’efficacité pour renouveler et professionnaliser l’activité d’installateur-distributeur. Pour la faire exister comme un métier à part entière dans l’inconscient collectif, nous avons mis en place un développement en concession. Cette formule juridique, proche du système de franchise, nous permettra d’organiser, de structurer et moderniser un monde manuel comme cela a déjà été le cas pour d’autres enseignes dans le secteur des cuisines et des piscines par exemple.
Au-delà de la revalorisation du métier de clôturiste, le concessionnaire Lippi pourra davantage se concentrer sur la relation avec la clientèle, être davantage dans la rencontre et l’échange plutôt que de se focaliser sur la complexité de ses savoir-faire. L’innovation commence par l’empathie, la vision et le courage d’un indépendant localement implanté.
Julien Lippi, directeur général LippiJulien Lippi : Depuis cinquante ans, Lippi a montré sa capacité à rebondir et à s’adapter face aux mutations sociales et économiques dans une activité fondée sur la création, la structuration et l’architecture de l’espace, dont la culture dans notre pays est très ancienne. Encore faut-il savoir lire, décrypter et transcrire ces codes pour les traduire dans une offre. Ce qui est d’ailleurs un travail que nous avons engagé avec L’École de Design de Nantes Atlantique.
En France, seuls deux industriels possèdent l’ensemble des savoir-faire propres à notre activité. Nos particularités sont la réactivité et l’innovation, dans un métier de commodité, non soumis aux modes et intégré dans la volonté actuelle de se fabriquer son habitat. Mon frère et moi-même avons beaucoup voyagé avant de prendre la tête de Lippi en 2008. Nous favorisons l’expression au sein de l’entreprise et avons intégré des profils très différents. Nous sommes contre la monoculture, la différence est une force plutôt qu’un risque. Nous sommes aussi attachés à la valeur sociétale de l’entreprise, à notre contribution au développement économique et à la vitalité de nos territoires, comme l’a indiqué le rapatriement de nos unités de production en Chine.
Pourquoi avoir organisé le réseau sous forme de concession ?
Julien Lippi : Notre organisation est le fruit de la rencontre de deux attentes : la nôtre, et celle de nos clients, les installateurs-revendeurs. Nous devions satisfaire les utilisateurs finaux, puisque nos produits ne prennent de la valeur et même vie que lorsqu’ils sont installés. Cela exigeait une alliance forte entre nous, industriels et concepteurs de produits, et les installateurs-revendeurs, révélateurs de l’ensemble de la chaîne de production. La matière grise que nous avons investie dans nos références doit intégralement parvenir jusqu’au consommateur, avec des conseils pertinents pour un usage adéquat. Notre valeur ajoutée ne résume plus aujourd’hui à des variantes dans l’épaisseur du fil ou l’apport de la couleur.
Pierre-Yves Laurent : Nous représentions jusque là un achat de contraintes, notamment pour se protéger de dangers environnants. Il fallait transformer le besoin en plaisir, et engager une démarche de design : style, ergonomie, fonctionnalité… Comme l’extérieur devient partie intégrante de l’habitat dans un univers de plus en plus restreint, la clôture dépasse maintenant son cadre utilitaire premier pour devenir un accessoire – par exemple, un bac de rétention d’eau -, voire du mobilier, dont l’armature s’appuie sur la clôture. Nous avons ainsi présenté lors de Batimat 2013 une offre déployée sur 6 gammes, simplifiant la présentation des 30 000 références de notre catalogue à nos concessionnaires, pour lesquels la communication et le marketing ne sont pas des activités maîtrisées. Cette mutation de notre marque va favoriser le développement de la notoriété de Lippi, optimiser nos coûts de production et valoriser le métier de nos partenaires artisans.
Nouveau concept Lippi
Comment allez-vous vous déployer sur le territoire national ?
Emilie Caron-Frappier : Pour le développement de notre réseau dans un panorama professionnel en grand mouvement, nous nous appuierons sur deux typologies de concessionnaires. Dans un premier temps, sur des clôturistes de métiers, déjà installateurs, cherchant à intégrer une pratique codifiée de leur activité – comme les bonnes pratiques sur les techniques de pose -, à suivre les évolutions de la réglementation – en termes de sécurité et d’assurance, notamment – et à rejoindre un partenaire pouvant être apporteur d’affaires sur de grands chantiers, comme cela a été le cas lors la clôturation du Château de Versailles. Dans un second temps, sur des profils de commerciaux-managers, puisque la technique de notre métier, ainsi que la méthode s’acquièrent à travers un parcours de formation.
Julien Lippi : Dans ce changement de statut pour nos adhérents, que l’on veut faire passer de clients à partenaires, Franchise Management nous a complètement accompagnés dans la modélisation de notre offre de concession « Lippi, l’esprit libre », ainsi que dans le recrutement et la formation des futurs concessionnaires. Bénéficier de leur expertise nous a fait gagner du temps, et donc en efficacité, pour conserver l’avance prise par notre offre auprès des utilisateurs finaux, notre originalité sur le marché.